PortraitsSaison 5

Être en deuil ensemble, entre israélien·nes et palestinien·nes – Robi – Parents Circle

Une vie marquée par le deuil

Robi est arrivée en Israël d’Afrique du Sud en 1967 ; elle arrivée comme volontaire après la guerre des Six Jours, pensant rester ici environ six mois. Elle souhaitait quitter l’Afrique du Sud car, étant très active dans le mouvement anti-apartheid, la situation devenait très tendue. Elle arrive en Israël et crée une relation d’amour et de haine avec ce pays, il était nécessaire qu’elle s’engage, et rapidement, pour la réconciliation.

Elle a travaillé en tant que journaliste au Jerusalem Post, puis auprès des personnes réfugiées. Robi a eu deux enfants qu’elle a élevés dans l’ouverture, David et Eran. David ne souhaitait pas faire son service militaire, mais il l’a fait, et à chaque fois qu’il devait aller en Cisjordanie occupée, il hésitait à partir, à déserter. Robi l’a toujours soutenu, et lui disait qu’elle le soutiendrait s’il allait en prison (les jeunes israélien·nes sont passibles de prison en refusant de servir au sein de l’armée israélienne). David est tué en 2002, sous les balles d’un sniper palestinien. Cet événement bouleverse complètement la vie de Robi, et c’est là qu’elle s’engage au sein du Forum des familles du Cercle des parents, ce cercle de personnes endeuillées qui rêvent d’un avenir meilleur.

Il n’y a pas moyen que je perde espoir. Il faut avoir de l’espoir. C’est une équation énorme dans tout projet de paix. Vous n’obtiendrez jamais la paix sans espoir. Et je n’ai pas le luxe d’abandonner l’espoir.

Robi

Parents Circle, une organisation peu commune

Le Forum des familles du Cercle des parents est une organisation israélo-palestinienne composée de plus de 600 familles endeuillées. Leur point commun est qu’elles ont perdu un membre de leur famille proche dans le conflit. Ces familles ont choisi la voie de la réconciliation. Leurs témoignages, auprès de milliers de personnes, sont souvent bruts et toujours émouvants. Selon l’association, le changement naît de ces interactions. Ces membres endeuillés, armés de la crédibilité de leur perte et du chemin peu commun qu’ils et elles ont choisi, ont ouvert une brèche dans la psyché d’une population endurcie. Ils et elles ont commencé à susciter une prise de conscience du conflit qui transcende l’histoire et la politique. Si le PCFF espère le jour où les dirigeant·es politiques parviendront à un accord de paix, elles et ils sont fermement convaincu·es que la réconciliation entre les peuples israélien et palestinien est essentielle pour que la paix soit durable.

Le PCFF partage des témoignages sous différents formats : ateliers en milieux scolaires, conférences et commémorations, à chaque fois une personne israélienne et une personne palestinienne témoignent ensemble de leurs histoires. L’organisation met en place des camps d’été faciliter chaque année par des ancien·nes participant·es, ces camps sont aussi des lieux de recrutement de jeunes ambassadeurs et ambassadrices de paix. Le PCFF a également des groupes d’empowerment de femmes. Lorsque nous étions en Israël et en Palestine, près de 27 palestinien·nes et 11 israéliens ont été tué·es. Alors cette initiative résonne particulièrement.

« Vous n’êtes pas autorisés à tuer qui que ce soit au nom de mon enfant »

Lorsque les soldats viennent annoncer à Robi la mort de David, son fils, la première chose qu’elle leur dit c’est « vous n’êtes pas autorisés à tuer qui que ce soit au nom de mon enfant ». C’est pour dire le cycle de violence interminable en Israël et Palestine. Comprendre l’autre, son narratif et son histoire, lui a permis de se relever, avec toute sa peine, pour expliquer au monde l’univers des possibilités lorsqu’on voit l’humanité de l’autre.  Robi nous a aussi partagé l’importance d’avoir créé un groupe de femmes au sein de l’organisation. Selon elles, les hommes ont pris trop de places dans ce cycle de violence et il est temps de laisser la place aux femmes dans les négociations, car ce sont les seules à comprendre dans leur chair la perte de leurs enfants (toujours selon Robi).

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