JournalSaison 4

La traversée de la rivière Miljicka

IFT 4 with General Divjak

Sarajevo est une ville fendue d’ouest en est par un cours d’eau, la rivière Miljicka. Depuis notre arrivée, nos différents rendez-vous ne nous avaient permis de découvrir que la rive droite de la ville. Ce matin, nous avons foulé pour la première fois la rive gauche pour aller rencontrer Jovan Divjak.

L’éducation, une arme de paix massive

Jovan Divjak est un ancien général de brigade de l’armée de Bosnie-Herzégovine à la retraite. Jusque là, rien de palpitant. Mais en 1992, quand la guerre entre Bosniaques, Serbes et Croates a éclatée, le général Divjak, d’origine ethnique serbe, a choisi de rester défendre la Bosnie-Herzégovine face à l’armée de la république serbe de Bosnie. Autrement dit, il a refusé de choisir son camp uniquement en fonction de son ethnie et de sa religion.

Aujourd’hui, il dirige une association qu’il a co-fondée en 1994 et qui s’appelle Obrazovanje Gradi BiH (« l’éducation construit la Bosnie-Herzégovine »). L’objectif de cette association est d’une part d’accorder des bourses d’études à des enfants victimes de la guerre de 1992-1995, et d’autres part d’aider ces enfants à dépasser les syndromes post-traumatiques liés à cette guerre. Dans le cadre des ateliers sur les syndromes post-traumatiques, OGBH permet à des enfants d’ethnies différentes (croates, serbes, bosniaques), et donc de religions différentes, de se rencontrer et de surmonter leurs syndromes ensemble.

Nous avons d’ailleurs pu discuter un long moment avec Mersiha et Melina, deux jeunes femmes qui ont bénéficié d’une bourse de l’association et qui y travaillent désormais. Mersiha nous a partagé une belle définition personnelle de la paix :

Quand je pense à la paix, je pense à la guerre. Pendant la guerre ce qui m’a manqué le plus c’était la liberté, les rires et la joie. La paix c’est ça pour moi.

On se sentait tellement bien avec elles, qu’on a failli oublier notre rendez-vous suivant. Heureusement, Mersiha nous a raccompagnés en voiture jusque dans le centre-ville de Sarajevo où nous devions retrouver Bryan. On a tout juste pu manger un burek (encore) en 3 minutes avant qu’il arrive.

Le dialogue des mains

Bryan vient des États-Unis. Comme beaucoup d’étrangers à Sarajevo, il travaille sur la question de la construction de la paix dans une organisation internationale. La sienne s’appelle Peace Catalyst et travaille main dans la main avec l’organisation bosnienne Mali Koraci (« petits pas » en français) à l’amélioration des relations islamo-chrétiennes en Bosnie-Herzégovine. Pendant notre entretien, il nous a partagé une intéressante vision du dialogue interreligieux :

Souvent les gens ont peur du dialogue interreligieux, parce qu’ils imaginent un imam, un rabbin, un prêtre et un pasteur assis à une table pour discuter. Mais il y a plusieurs sortes de dialogue : celui de la tête, du ventre, des mains et du cœur. Ça ne sert à rien de parler si on n’agit pas ensemble.

Cette philosophie du faire ensemble résonne forcément dans nos esprits car elle fait écho à la pédagogie mise en place par Coexister en France.

La mémoire dans la ville

En sortant de ce rendez-vous, Adèle nous a expliqué ce que sont les roses de Sarajevo : des traces de grenades ou d’explosifs dans les rues de la ville qui datent de la guerre de 1992-1995 et qui ont été peintes en rouge pour que chacun conserve la mémoire de cette guerre. Puis nous sommes rentrés à l’appartement de Vjeko pour travailler. J’en ai profité pour ausculter un des appareils photo qui ne fonctionnait plus depuis le matin. Finalement, plus de frayeur que de mal, après une mise-à-jour il a redémarré sans problème.

Vincent

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