PortraitsSaison 5

Offrir des repas pour Noël avec sa communauté juive – Graciela

Portrait

Graciela est Argentine et psychologue. Il y a 26 ans, elle est arrivée à Guadalajara au Mexique et y a fondé la communauté juive massortie Communidad Hebrea.“Je suis là car personne ne sait rien sur le judaïsme.” Carpe Diem a invité Graciela, en tant que présidente de la communauté juive massortie, à parler de sa religion. Pour elle, il est important que les personnes non-juives apprennent à connaître sa conviction et déconstruisent leurs préjugés.“Après cela, j’ai cherché à faire plus que parler. J’avais envie d’agir ou de prier ensemble. C’est ce que j’ai apporté à Carpe Diem : faire des choses ensemble pour les gens. Je suis sûre qu’agir est plus important que croire.” C’est ainsi que naissent “10 000 Navidades en Una” en 2019 et l’initiative Grupo Interreligioso Alimentario (GIRA)*, pendant la crise du Covid en 2020.

Graciela fait aussi partie du Conseil Interreligieux de Guadalajara et elle est la seule femme, la seule qui n’est pas en charge de sa communauté. Elle nous partage que c’est difficile d’y être entendue en tant que femme alors qu’à Carpe Diem, c’est différent.
“Je suis née dans une famille juive non religieuse. Mon frère a 8 ans de plus que moi et je voulais être comme lui, faire des études, enseigner et être responsable de communauté mais pas être rabbine. Maintenant que je travaille avec des hommes religieux, je veux vraiment être rabbine. Je pense que j’ai besoin de cela, pas eux.”
Confrontée à la misogynie de certains leaders religieux, elle en a marre, par exemple, de ne pas pouvoir bénir les aliments comme les autres lors des repas collectifs. C’est finalement le dialogue avec d’autres communautés qui lui a fait prendre conscience de sa vocation et l’a engagée dans des études de rabbinat !

Son engagement

C’est sa foi qui porte Graciela et l’amène à agir au sein de la société. Elle suit le précepte philosophique juive du “Tikkoun Olam”, pour agir pour la « réparation du monde », en faveur de justice sociale*.

La psychologue témoigne des impacts de l’action interreligieuse : “Maintenant, nous sommes amies avec Gabi et Martha, nous sommes vraiment frères et sœurs. On s’inquiète et on se soutient les un·es des autres. Je pense que les femmes font le bon fonctionnement des communautés, même si je déteste faire cette différence : elles arrivent à la fois à penser et à faire. Nous avons le leadership le plus important, de la logistique au réseau en passant par le fundraising.” Elle reconnaît aussi que ce n’est pas facile de vivre en tant que petite communauté massortie d’une centaine de familles à Guadalajara. La coopération interreligieuse, notamment avec l’Église catholique, a été un véritable levier pour être reconnue dans le paysage religieux auprès des autres communautés et du gouvernement.

Néanmoins, Graciela a récemment quitté le conseil interreligieux de la ville car elle n’était plus en accord avec leurs idées. Par exemple, les membres ont appelé à manifester pour les “droits de la famille”, c’est-à-dire contre le mariage de personnes de même sexe. “Le gouvernement demandait qu’il n’y ait pas de discours homophobes dans les lieux de culte. Ils n’étaient pas contents et ils ont dit que c’était de l’ingérence.” Il s’agit ici d’une des premières initiatives que nous découvrons pendant le voyage qui utilise l’interreligieux comme un outil d’exclusion, ce qui nous a fait réfléchir une fois de plus aux notions de “faith for good” et de “faith for bad”.

*Cela a fait écho pour nous aux mots de Ruth et Michaël des Racines de Demain à Lyon. Retrouvez leur portrait dans les posts de septembre 2021 !

Son action

Graciela nous a exposé son projet “10 000 Navidades en Una”, c’est-à-dire “10 000 Noëls en un” auquel elle a associé le cardinal Francisco Robles. Depuis 2019, la Communidad Hebrea s’associe à 35 paroisses catholiques pour offrir, le jour de Noël le 25 décembre, des milliers de dîners pour des personnes sans abris ou en situation de précarité. Les fidèles des deux communautés sont invités à donner 100 pesos pour partager l’amour et la joie.
Pour Graciela, il s’agit de la zedaka, c’est-à-dire l’aumône ou la charité pour la justice sociale dans le judaïsme. Elle gère la logistique monumentale de l’initiative. Son charisme et son dévouement pour que chacun·e puisse fêter Noël nous a beaucoup touchées. Si elle ne fête pas cet événement chrétien, il est important pour elle d’apporter son soutien à celles et ceux qui en ont le plus besoin.

Pendant 5/6 ans, elle a aussi organisé un événement pour Hanoucca (qui rappelle l’anecdote de Rafael de Casa Tibet) : Lumières pour la Paix. “On a invité symboliquement les religieux à allumer une bougie, faire une prière et dire quelque chose sur la paix.”

Ses conseils : “On doit travailler ensemble. C’est beau d’apprendre, de prier mais il faut agir ensemble. Il faut faire en sorte que les gens se sentent plus à l’aise et mieux dans le monde. Je respecte tout le monde et je pense que c’est le plus important. Quand nous avons commencé 10 000 Noëls en 1, nous ne voulions pas juste donner de la nourriture mais faire vivre Noël.”

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